Chapitre 1 : la belle époque
C’était une belle époque que celle qui a baignée mon enfance.
Chaque été, toute la famille se retrouvait dans la grande demeure de l’oncle Ruthvald près de l’Académie Vif-Argent.
Je me souviens encore des parties de cache-cache que nous faisions à l’époque.
Chaque année nous découvrions de nouveaux lieux où attendre patiemment qu’on nous trouve, et chaque année nous ne manquions pas de découvrir quelques cachettes plus sûres encore. Il arrivait que nous y passions des heures avant que quelqu’un ne finisse par nous débusquer, ou que l’odeur des goûters de maman ne nous fasse sortir.
Nous organisions quelques dîners, parfois, avec les habitants de la ville toute proche. Le jardin s’illuminait alors de toutes les torches que nous pouvions trouver ; les bardes, les compteurs et tous les artistes de la région nous émerveillaient de leurs tours les plus spectaculaires.
Un soir, un magicien nous avait montré ses prouesses. Alors que celui-ci endormait la vieille Bincle, la boulangère de la ville, d’une main, il magnait de l’autre les éléments. Le clou du spectacle était l’orage qu’il avait fait surgir au-dessus de nous, accompagné de ses rafales de vent, et de la pluie qui n’avait pas manqué d’arroser copieusement l’assemblée.
Maman m’avait prêté sa longue cape bleue afin de que je puisse m’abriter pendant que nous rentrions nous sécher.
« Peste soit de ces magiciens et de leur tours » grommelait-elle.
Le banquet, inondé, avait dû être écourté après le dernier tour. Qu’importe, nous avions ri de bon cœur et jurions qu’on ne nous y reprendrait plus.
Dès le lendemain pourtant, nous, la bande des cousins comme nous nous étions surnommés, étions bien décidés à montrer notre valeur magique. Chaque bambin courrait à travers champs en lançant ses incantations, imaginant de terribles éclairs surgissant du bout de bois ramassé qui nous servait de baguette.
Seul Izharea, ma sœur, cru un instant sentir quelques picotements au creux de la main.
« J’ai réussi ! Sentez-vous cette odeur de bois brûlé ?» criait-elle.
Aucun d’entre nous sentions quoi que ce soit, mais dans l’excitation, nous avions tous acquiescé, faisant d’elle le membre d’honneur de notre petit groupe.
Nos parties de cache-cache s’étaient arrêtées, et nous passions maintenant le plus clair de notre temps à traquer la moindre information qui nous permettrait d’égaler le magicien du banquet…